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Numéro 569

Vendredi 10 mars 2023

Edito

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Stéphane Babey

Les machines parlent aux machines

Le géant des médias allemand Axel Springer, présent en Suisse via sa participation dans Ringier, va virer des humains pour faire réaliser des tâches journalistiques par des intelligences artificielles (IA). Cela afin de générer davantage de bénéfices. Mais quelle bonne idée ! A une époque où internet regorge déjà de contenus complotistes et de propagande conçus et distribués par des machines, voilà que la presse dite sérieuse commence à faire la même chose. Alors que l’on n’a jamais eu autant besoin de journalisme professionnel pour combattre la désinformation, qui est le grand mal actuel menaçant directement nos démocraties, des patrons aveuglés par le profit font tomber une barrière supplémentaire.

On peut en tirer plusieurs conclusions. D’abord que les actionnaires d’Axel Springer pourraient gagner encore plus d’argent s’ils viraient les patrons de la boîte pour leur substituer des IA. Car la décision de remplacer les journalistes par des machines est tellement simplette qu’une machine aurait pu la prendre pour beaucoup moins cher.

Ensuite qu’il ne restera bientôt plus d’humains sur les réseaux pour écrire des textes, créer des images, générer des films. Dans ces conditions, on ne voit pas trop la raison de continuer à y aller. Autant laisser les machines s’amuser entre elles. Elles n’ont pas besoin de nous pour ça. Au bout d’un moment, entre les bots qui construisent le Web et ceux qui le parcourent à des fins diverses mais principalement malhonnêtes, les IA vont commencer à se manipuler elles-mêmes, à s’abrutir de mensonges les unes les autres, à s’arnaquer parmi à coups de placements en cryptomonnaies foireux, à se faire croire mutuellement que la Terre est plate ou que le dernier populiste à la mode est le sauveur de l’Humanité.

Pendant ce temps, on pourra lire des journaux papier écrits par de vraies gens et prendre peut-être quelques décisions intelligentes concernant l’avenir. Ce n’est pas très réaliste, mais vu qu’on nage en pleine science-fiction, autant y aller
à fond.

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