top of page
Numéro 609

Vendredi 16 février 2024

Edito

4b8060fd-82d0-41f0-8f15-3c7220e55eed

Philippe Clément

Dérangeante cacophonie de cacochymes narcissiques

Cinq caciques narcissiques. Cinq orateurs qui pensent encore qu’ils ont la parole quand bon leur semble. Cinq princes-évêques qui estiment avoir voix au chapitre ad vitam aeternam. Cinq ex-Sages pétris d’égocentrisme et persuadés que le bon peuple ne saurait vivre sans leur docte avis. Cinq reliques d’un autre temps qui viennent s’immiscer dans le débat démocratique pour expliquer que non, la masse laborieuse ne saurait prétendre toucher indûment une treizième rente AVS annuelle.

C’est choquant. Surtout quand on sait que lesdits édiles pontifiants touchent, eux, une retraite mensuelle qui dépasse les 20 000 francs par mois.

Tellement choquant que les réactions ont fusé. De la classe politique aux réseaux sociaux, la calme Helvétie s’est échauffée. Et la grogne populaire gronde. A se demander s’il n’y a pas, même, quelques Playmobil courroucés qui crient leur désapprobation devant la maquette du Palais fédéral de Swissminiatur à Melide.

Qu’y aurait-il de plus incongru qu’un membre de l’élite qui vient scruter ce que les manants mettent, en plus du Maggi, dans leurs épinards, quand ils peuvent encore s’en payer ?

Un collège d’éminents spécialistes médicaux, tous masculins, qui disserteraient des affres de la ménopause dans un débat télévisé ? Un élu populiste genevois qui prétendrait que l’école se résume à « torcher les gosses » et qu’il n’y a pas besoin d’être titulaire d’un master pour cela ? Un journaliste qui viendrait expliquer à une humoriste comment être drôle ? Un constructeur automobile qui mettrait au point un moteur diesel propre ?

Heureusement, tout cela n’a jamais existé.

Probablement parce que, contrairement à ces ex-conseillers fédéraux, les gens normaux se souviennent que s’il faut environ deux années pour apprendre à parler, il en faut une bonne soixantaine pour savoir quand il convient de se taire.

bottom of page