Vendredi 22 mars 2024
Edito
Stéphane Babey
Le luxe inouï de vivre en Suisse
Selon le baromètre suisse des familles publié la semaine passée, un ménage sur deux a du mal à boucler ses fins de mois, y compris dans la classe moyenne. Une situation qui ne fait qu’empirer d’année en année. L’impossibilité de mettre
de l’argent de côté incite les couples à renoncer à avoir davantage d’enfants. Rappelons-le, la Suisse est considérée comme un des pays les plus riches du monde.
Parallèlement, on apprenait lundi que Credit Suisse a distribué 32 milliards de francs de bonus durant les dix dernières années, alors que la banque s’enfonçait dans une spirale de pertes et de scandales. La direction a même émis des obligations pour 16 milliards afin de payer ces cadeaux alors qu’elle perdait de l’argent, obligations qui ont été purement et simplement déclarées caduques lors du rachat par UBS l’an passé, ce qui a lésé de nombreux investisseurs. Les banquiers ont en revanche pu conserver leurs bonus.
Enfin, 20 Minutes (18.3) a sondé ses lecteurs au sujet de la
treizième rente plébiscitée par la population. Il en ressort que les citoyens estiment qu’il faudrait financer ce supplément d’AVS en taxant les transactions financières. Ce à quoi tous les défenseurs des banques s’opposent, évidemment. Ils trouvent que les assurés n’ont qu’à financer ce luxe inouï en cotisant plus.
Est-ce que vous voyez se dessiner un schéma en rapprochant ces trois informations ? Non ? Faites un effort. Quelque chose qui tournerait autour de la privatisation des gains et de la collectivisation des pertes. La course ultralibérale vers le profit de quelques-uns au détriment de tous les autres. Ce genre de choses.
Et qu’en déduisez-vous ? Qu’il faudrait réglementer la pratique des bonus, taxer les transactions financières, afin de mieux répartir l’argent au sein de la société ? Si c’est votre conclusion, c’est que vous n’avez rien compris à ce pays et que vous resterez pauvre toute votre vie. La seule conclusion qui vaille, c’est qu’il faut exercer la profession de banquier. Un fois ce but atteint, vous pouvez vous foutre de tout le reste...