Vendredi 31 mai
Edito
Stéphane Babey
Les vieux cons contre le progrès
Le monde a vécu un tournant historique fin 2022, lorsque OpenAI a rendu ChatGPT accessible au grand public. On peine encore à s’en rendre compte, mais il s’agit d’un séisme comparable à l’arrivée du web ou à la commercialisation du smartphone. Les technologies d’intelligence artificielle utilisables par tout un chacun vont bouleverser en profondeur la société.
Or, il y a très peu de voix critiques qui s’élèvent pour interroger cette nouveauté annoncée à la fois comme un espoir pour l’Humanité et une cause possible de la fin du monde, rien que ça, par les gourous qui en font la promotion. C’est dû au fait que les entreprises de la tech avancent à marche forcée vers des modèles d’IA toujours plus puissants, tandis que le commun des mortels n’y comprend pas grand-chose. Et puis critiquer le progrès, c’est toujours courir le risque de passer pour des vieux cons.
A Vigousse, nous n’avons pas peur de passer pour des vieux cons. Ou même des cons tout court, d’ailleurs. C’est pourquoi nous avons décidé d’empoigner ce sujet fondamental et de vous proposer une première salve d’articles sous forme de dossier dans ce numéro. D’autres papiers suivront.
Au petit satirique romand, on est loin de partager l’optimisme béat des ravis de l’IA. On est même assez catastrophés par la tournure que prennent les événements et le manque de réaction des autorités. Cette inertie des institutions n’a hélas rien de nouveau. On commence seulement à promulguer des lois pour protéger les jeunes des dégâts occasionnés par les réseaux sociaux, alors qu’ils existent depuis plus de vingt ans. La société civile a toujours 37 trains de retard par rapport aux multinationales qui se goinfrent en commercialisant des produits potentiellement dangereux en se foutant complètement des conséquences.
L’histoire est bien partie pour se répéter avec l’IA. Alors on a décidé de gueuler. Dans le désert sans doute. Mais gueuler, ça fait toujours du bien !