L’as des os

« Le conseiller fédéral Guy Parmelin s’est fracturé le haut du bras droit à la suite d’une chute dans son bureau. » Laconique, le communiqué de la Confédération crée la stupeur. L’esprit s’emballe, les questions fusent : mais comment, mais encore ? Qu’est-ce qu’il a fabriqué ? On veut savoir ! (A moins, c’est possible, qu’on ait à tartiner un édito sur une énième parmelinade par nature sans consistance, mais écartons vite cette hypothèse.)

Que s’est-il passé, donc ? Et d’abord, que signifie « à la suite d’une chute » ? Une chute de quoi ? De sa personne ou d’autre chose ? C’est ambigu. Voudrait-on nous cacher les faits ? Le peuple a droit à la vérité !

Dans le doute, les folles conjectures s’enchaînent. Du haut d’un rayon, une chute de pesants classeurs fédéraux s’est-elle abattue sur le malheureux ? Sa chaise a-t-elle cédé sous le poids des responsabilités ? Ou bien, occupé à une affaire quelconque, s’est-il encore pris les pieds dans le tapis ? S’est-il encoublé sur un verbe irrégulier allemand particulièrement retors ?

Jean-Pascal Delamuraz s’était jadis amoché lui aussi, en tombant dans son appartement de fonction bernois. Des pisse-froid avaient alors ricané en accusant le chasselas. Mais là, ce genre de basse calomnie n’a pas cours : on ne saurait imaginer Guy Parmelin beurré au bureau, où il se consacre pleinement à du travail assidu. Enfin, probablement.

La violence du drame ajoute par ailleurs à la perplexité. « Le haut du bras », c’est l’humérus. Ce n’est pas une brindille osseuse qui se brise pour un rien. L’humérus c’est l’os de base, c’est du robuste, c’est droit, simple et conçu pour durer (même si la tête est réputée plus faible). Mais qu’est-ce qu’il a foutu, Parmelin, nom de bleu ?

Faute d’éléments plus concrets à ce stade, la seule conclusion possible revient à une bête chute, pour le coup sans mystère, au point d’être carrément facile : nul ne pourra plus dire désormais qu’en tant que conseiller fédéral, Guy Parmelin ne casse rien. Bon rétablissement !