Là-haut sous la montagne

Les choses placées en hauteur tendent à tomber et à s’accumuler dans les creux. Ça s’appelle la gravité. Par conséquent, les éboulements et avalanches surviennent depuis toujours. En 563, un gros bout de montagne s’est effondré d’un coup dans la plaine du Rhône, écrabouillant le bourg de Tauredunum et provoquant un raz-de-marée dévastateur sur le Léman. En 1806, un éboulement a détruit le village schwytzois de Goldau. En 1881, des rochers ont aplati Elm dans le canton de Glaris…

Ces précédents notoires indiquent-ils, comme le suggèrent l’UDC et bien des bourrins adeptes des commentaires en ligne, que les événements de Blatten n’ont rien à voir avec le dérèglement climatique ? Non, bien sûr, au contraire : le pergélisol qui cimentait les roches instables fond désormais en altitude, toujours plus vite, ce qui à l’évidence précipite les choses. Ça ne va pas s’arranger, donc.

En Valais, le conseiller d’Etat UDC Franz Ruppen, qui lorsqu’il siégeait à Berne votait contre toute mesure écologique, qui a nié toute urgence climatique (Le Nouvelliste, 8.5.22) et qui s’est donc opposé farouchement à la loi climat, est en charge de l’environnement… Les caciques UDC Oskar Freysinger et Jean-Luc Addor, nourris de science infuse et de théories charlatanesques, mieux-sachants que tous les climatologues du monde, disent ne pas croire à l’origine humaine du réchauffement, pourtant clairement attestée. Jusque dans le Lötschental obstrué par l’effondrement, d’aucuns continuent de vomir les écolos en les accusant de tous les maux. La routine.

Au lieu d’écouter enfin les scientifiques, d’agir vite, de débloquer fissa les fonds publics pour aider les victimes de la catastrophe (comme ce fut fait naguère pour les banques), les partis se répandent en politicailleries, se chamaillent, ergotent : qui va payer les dégâts, où va-t-on prendre l’argent, et d’abord le dérèglement climatique est-il réellement en cause ? Comme la roche et la glace, on tombe de haut. Et la politique, elle, tombe bien bas.